Aeris Neturio. "Aeris", "l'air" en Latin. Quelle ironie que de se faire nommer par l'élément symbolique de la liberté quand on mène une vie de chien enchaîné, dans le fin fond de l'Italie, avec ses deux parents alcooliques, qui le battent, le harcèlent pour telle ou telle mystérieuse raison. En fait, il y a une raison principale à tout cela: ses parents ne l'aiment pas. Et le mot est faible. Ils le détestent, le maudissent. Pour avoir gâché leur vie. Son père était de la prestigieuse famille des Neturio. Était, car quand la nouvelle se fit qu'il allait être père d'un enfant avec une femme de basse condition, sa famille le renia. Ils s'installèrent dans la maison des parents de la mère, quand ceux ci moururent. C'est dans cette atmosphère de pauvreté et de ressentiment que naquit Aeris.

La veille, c'était le 15 Mai 2003. Aeris avait fêté son seizième anniversaire. Enfin, si on peut qualifier de "fêter" avoir passé une énième journée sur le lopin de terre, à l'arrière de leur taudis, que ses parents lui font vainement tenter d'entretenir, quand ils ne se sentent pas d'humeur à le harceler. La routine pour Aeris. Une goutte supplémentaire dans l'océan morne et monotone de sa vie. Mais cet océan allait être grandement bouleversé par un évènement pour le moins inattendu.

Le lendemain, le 16 Mai, leur "demeure" reçut quelque chose qu'elle n'avait pas eu depuis des lustres: une visite. La dernière en date est celle des dix ans d'Aeris. C'était Herbert Neturio, l'oncle en qui le jeune homme avait une confiance absolue. Aux yeux d'Aeris, Herbert est plus un père qu'un oncle. A chacune de ses visites, il lui avait raconté ses voyages à travers le monde, lui avait enseigné ce qu'il savait, inculqué autant de connaissances que de valeurs morales. En effet, Herbert voyait en Aeris plus que le fils d'un pauvre couple plein de rancœur. Il voyait un jeune homme plein de qualités, animé d'une soif d'apprendre qu'il n'avait vu qu'une seule fois dans sa vie. Quand il regardait Aeris, Herbert se voyait lui même, adolescent. Et c'est pour cela qu'il fit enfin ce qu'il prévoyait de faire depuis qu'il avait prit connaissance du "potentiel" d'Aeris. Dans la nuit du 16, il assomma l'adolescent et partit pour Paris. Ses parents ne le revirent plus jamais, et vice versa.

A son réveil, Aeris ne saisissait pas à quel point sa vie allait être différente, et Herbert avait beau lui expliquer sous toutes les coutures, encore et encore, rien à faire, il ne comprenait pas. En tout cas, il pouvait au moins être sur d'une chose. En fait, non, deux choses. D'une, il avait très, très, TRÈS mal à la tête, et il se demande encore aujourd'hui avec quoi Herbert à bien pu l'assommer. De deux, sa nouvelle vie ne faisait que commencer.

Ayant toujours vécu avec pour seule compagnie ses parents chtarbés peu conventionnels, il n'a aucune expérience en terme de relation sociale. En fait, il ne comprend pas les autres, leurs réactions, leur façon de penser. Il a donc demandé à Herbert s'il pourrait un jour les comprendre. Il lui proposa alors, au vu de ses aptitudes (rigueur, patience, maîtrise de soi) et de sa soif de découverte, de s'engager dans des études pour devenir Psychiatre. Évidemment, il avait d'énormes lacunes, vu qu'il n'avait pas eu une éducation normale (en fait, pas d'éducation du tout, si ce ne sont les quelques visites de Herbert), mais, à force de persévérance et de rigueur dans ses efforts pour combler lesdites lacunes, il put se frayer une place dans le tout nouveau monde qu'il avait découvert dans son école.